« Shanghai – ville de magnificence et de misère, ville de l’opium et de la déchéance. Mais aussi ultime port de l’espoir, symbole d’une volonté acharnée de vivre. Car tandis que les grandes démocraties regardaient impassiblement s’accomplir le génocide tramé par Hitler, Shanghai, ville ouverte, demeurait le seul endroit au monde qui pût accueillir et offrir un salut cher payé à une vingtaine de milliers de Juifs allemands et autrichiens, ainsi qu’à trois mille huit cents coreligionnaires qui étaient parvenus de justesse à fuir d’autres pays occupés – avant que l’épaisse fumée des fours crématoires ne vienne obscurcir le ciel de l’Europe. »
Dans le quartier de Hongkew, district de Shanghai, se terre toute une communauté
d’exilés juifs, ayant fui in extrémis l’Europe nazie. Parmi eux, Theodor
Weissberg, célèbre violoniste de l’orchestre philarmonique de Dresde arrêté dans
la Nuit de cristal et rescapé du camp de Dachau grâce à la détermination de son
épouse Elisabeth ; la jeune et séduisante Hilde Braun, ancienne égérie des
studios de cinéma berlinois et, de son vrai nom, Rachel Braunfeld ; Vladek,
Tchèque mystérieux devenu espion. Tous, ils ont rejoint Shanghai bombardée par
l’aviation japonaise et désormais occupée, nouvelle Babel où se mêlent les
concessions internationales continuant de vivre dans le faste et l’insouciance,
les quartiers chinois et les bouges où sévissent désespoir, chômage et misère
sans issue, ville-monde où réside le baron Ottomar von Dammbach, représentant
diplomatique du IIIe Reich.
Entre récit historique et roman d’espionnage, Angel Wagenstein entrelace dans Adieu Shanghai, avec un humour qui nous sauve de la tragédie,
exils individuels et intrigues internationales, consacrant un grand livre à ce chapitre peu connu de la persécution nazie.
« À la fin des années 1930, tous les pays refusent leur accès aux Juifs qui fuient la démence hitlérienne, sauf les nantis disposant de solides relations. Aussi surréaliste que cela puisse paraître, seule la concession internationale de Shanghai offre un havre de paix à quelque 23 000 proscrits arrivés de l'Europe nazifiée mais aussi de la Russie stalinienne. Cet épisode inconnu de la Seconde Guerre mondiale a été l'inspirateur de mon livre tout comme les témoignages de solidarité et d'esprit de sacrifice de personnages entassés à Hongkew, quartier déjà surpeuplé, placé sous une protection diplomatique aléatoire en raison de l'occupation japonaise. Mes héros prouvent, s'il en était encore besoin, que l'homme n'est pas toujours un loup pour son semblable. » – Angel Wagenstein
Durant la Seconde Guerre mondiale, il combat dans les rangs des Partisans. Dénoncé, arrêté, torturé et condamné à mort, il ne doit son salut qu’à l’arrivée de l’Armée rouge. À la fin de la guerre, il entreprend des études de cinéma à Moscou et entame une carrière de scénariste et de réalisateur, notamment récompensée par le prix spécial du jury au festival de Cannes en 1959 pour Étoiles. Lauréat de très nombreuses récompenses, parmi lesquelles le prix Jean Monnet de littérature européenne et le prix Alberto Benveniste remis par l’université de la Sorbonne, Angel Wagenstein est francophone. Écrivain reconnu et traduit dans de nombreux pays, il est notamment l’auteur du "Pentateuque ou les cinq livres d’Isaac et d’Abraham le Poivrot" (L’Esprit des péninsules, 2000, 2002). Traduit en français en 2004, "Adieu Shanghai" est à nouveau disponible dans cette nouvelle édition.
Angel Wagenstein est retourné en Bulgarie grâce à une amnistie, en tant qu'étudiant dans un lycée, où il rejoint un groupe antifasciste. Il est interné dans un camp de travail pour juifs en Macédoine, mais s'en échappe.