Une jeune centenaire, témoin d’un siècle franco-allemand
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31.10.2014

Dans “Mémoires d’un Français qui se souvient d’avoir été Allemand” J. Rovan évoquait le destin d’allemands d’origine juive (1) obligés de se forger une nouvelle identité.
Wally Karveno (alias Karla Loewenthal), quant à elle, était (presque) parvenue à oublier son passé allemand.
Pianiste, comédienne, poétesse, compositrice, elle est aussi une militante active pour la cause des femmes.
Wally Karveno (à 95 ans), aujourd’hui une jeune centenaire étonnante
Chevalier de l’Ordre du Mérite et des Palmes Académiques
Elle voulait oublier d’avoir été allemande

Elle naît à Berlin-Lichterfelde en 1914 et vient de fêter son centenaire ce 14 octobre.
Ses premières vingt-cinq années sont à l’image du siècle bouleversé : une enfance berlinoise suivie d’une adolescence à Berne (où son père, appelé à l’université, décèdera peu après),
ses premiers concerts à Berne, ses débuts théâtraux au Staatstheater à Berlin, l’expropriation nazie et son refuge dans sa famille bruxelloise, puis son départ à la conquête du théâtre parisien, enfin l’occupation passée à Limoges.

Avec un passeport établi avant 1933 (sans mention des racines juives du père), elle a connu l’internement à Gurs – avec sa mère et sa sœur – mais non pas la persécution raciale de Vichy.
Aujourd’hui encore elle garde la sensation d’avoir été étrangère partout. “A Berne, francophone par ma mère Bruxelloise, parlant le “Hochdeutsch” de mon père, à dix ans j’étais déjà une étrangère“.
En 1945, de retour à Paris, elle va devenir étrangère à son passé : “Je ne voulais plus jamais remettre un pied en Allemagne, ni parler l’allemand !“.
Karveno, son nom d’artiste sonne comme un souvenir breton et lui permet de se ré-inventer une identité. Elle revient aussi à son cher piano, alors que ses débuts prometteurs à Berne avaient été contrariés par un mal apparu suite à la perte de son père.
Depuis elle ne cesse de se produire en mêlant les genres musicaux, ses propres compositions et celles d’un répertoire élégamment éclectique. Mais, la réalité franco-allemande l’a rattrapée.
Des admiratrices allemandes l’invitent avec insistance à se produire en Allemagne et elle y a donné de nombreux concerts.
Et, avant tout, issue du prestigieux “Bildungsbürgertum” allemand (2), elle ne pouvait s’arracher à la grande langue du Staatstheater. Deux autres allemandes avaient tourné la page : Hanna Arendt et Marlene Dietrich.
L’une disait avoir sa langue allemande pour patrie et l’autre chantait “Ich habe noch einen Koffer in Berlin” (3).
Wally Karveno s’est, elle aussi, libérée d’une dissimulation : “Je me sens française, mais maintenant je me souviens de mon origine allemande“.

Hommage à Roussel pour flûte et piano
Azur Classical AZC098
Coralia Galtier (flûte)
Alain Raës (piano)

Marianne Mélodie 4811.246 (1951 La Boite à Musique BAM 504 / 505)
Agnès Capri, chant
France Olivia, piano
2012

Concertino pour piano et orchestre de chambre, Op.58
Composé à Gurs in 1941 (reconstitué par Franceco Lotoro)

Pasacaille Graduée : 18 Variations pour Piano.
Éditions M. Combre

Analekta AN 2 9141
La robe de lune - Extrait de l'album "L'heure rose"
Hélène Guilmette, soprano
Martin Dubé, piano
https://www.youtube.com/watch?v=feYYobhGQo4
Née à Berlin d’une mère violoniste et d’un père biologiste qui avait étudié avec Louis Pasteur, Wally Karveno (née en 1914) a mené une double vie de comédienne et de concertiste, publié une autobiographie, "Madame Quelqu’un", sans négliger pour autant l’enseignement et la composition, qu’elle pratiquait déjà à l’âge de cinq ans. Aussi à l’aise dans les cabarets que dans les plus grands théâtres, elle propose ici une mélodie délicieuse que n’aurait pas reniée Kurt Weill. Presque centenaire, elle vit à Paris et se produit toujours en concert.

Interview de Wally Karveno
Enregistré à Studio Labroue - Mai 2011
Interview de Willy Karveno (2011) Fichier audio MP3 [81.9 MB]


Wally Karveno se produit encore à l'âge de 97 ans et est toujours une artiste très active.
Ici, lors d'un concert de musique orchestrale sous la direction de Gerd-Uwe Klein, à Schömberg, suivi d'une séance d'autographes.


Toujours très coquette, les yeux bleu azur, Wally Karveno n’est pas une pianiste comme les autres.
Agée de 99 ans, elle donne toujours des cours de piano, quelques concerts et joue deux fois par semaine bénévolement dans une église.
Entre dynamisme et exigence, la musicienne revient sur son parcours et sa passion.