Les Zazous
BDVO167

Dessins & Scenario : Estelle Meyrand-Rodolphe

La propagande de Vichy et la presse de la collaboration les prennent pour cible.
Habillés de chic et de choc, tout de large vêtus, portant parapluie (fermé) et coiffure excentrique,
les zazous jettent un vent de liberté et de fronde adolescente sur la France de l'Occupation
et de la Révolution nationale.

 

 

- Un deux trois, swing (Lucchesi Roger - Lemarchand H.) 1939
- Le swingaléro (nouvelle danse) (Lacoste René - Hermite M.) 1939
- Swinging the blues (Allier Pierre) 1940
- Dansez (Wraskoff et son orchestre - Raymond) 1940
- Festival swing 1941 (Allier Pierre) 1940
- Festival swing 1942 (Rostaing et son orchestre - Hubert) 1941
- Tam tam (Viseur et son orchestre - Gus) 1941
- Gitan swing (Murena et son ensemble swing - Tony) 1941
- Sauts de rythme (Jefferson Maceo) 1941
- Riff 41 (Chiboust Noel) 1941
- Swing obsession (Yatove et son grand orchestre - Dera Jean) 1941
- Etes-vous swing ? (Wraskoff et son orchestre - Raymond Wraskoff) 1941
- Rythme et swing (Bizet Marie - Casanova J.) 1941
- Pour danseurs seulement (Ventura Ray) 1941
- Definition of swing(Wraskoff Raymond) 1941
- Rythme (Hess Johnny - Martelier M.) 1941
- Rythme (Chardon Félix - Martelier M.) 1941
- Il est rythme (Hess Johnny - Martelier M.) 1941
- Surprise party (Ferret Sarane) 1941
- Ambiance (Le Jazz de Paris - Razaf Andy) 1941
- Ils sont zazous (Hess Johnny - Martelier M.) 1942
- Y a du swing au village (Solar Jean - Blanche Francis) 1942
- La poule zazou (Trenet Charles) 1942
- Chez moi à 6 heures (Reinhardt Django) 1942
- Appel au rythme (Chiboust Noel) 1943
- Ils sont zazous (Mingand - Pierre Martelier) 1943
- Mettez-vous dans l'ambiance (Hess Johnny - Solar Jean) 1943
- Atchoum swing (Rogers Brocey - Mireille) 1943
- Machine à écrire swing (Metehen et son orchestre - Jacques Metehen) 1943
- Partie de plaisir (Viseur Gus) 1943
- Valse swing (Metehen et son orchestre - Jacques) 1943
- Y a des zazous (Andrex - Vincy) 1944
- Swing rêverie (swing 42) De Trebert Irène - Riesner Lawrence) 1944
- Goût du jour (Chiboust Noel) 1944
- Je suis Jitterbug (Hess Johnny - Larue Jacques) 1945
- Il fait des. (Montand Yves - Piaf Edith) 1945
- In the mood (Murena Tony - Razaf Andy) 1945

Sélection et Texte Jean Buzelin & Marc Monneraye

Le jazz et le swing furent, pendant les années noires de la guerre et de l’occupation, un incroyable champ de liberté, un vent de fraîcheur et d’espérance pour une jeunesse qui, malgré la situation, voulait vivre. À l’intérieur du peu d’espace dont ils pouvaient jouir, les zazous et autres swings, en se démarquant de la grisaille ambiante, s’identifiaient par leurs tenues provocantes, se reconnaissaient dans le jazz qui, venant d’Amérique, représentait l’espoir, et se rassemblaient autour des vedettes françaises, chanteurs et musiciens, qui avaient épousé les formes musicales rythmées. On a souvent dit et écrit que le jazz avait été interdit par l’occupant. Grossière erreur, il na jamais été aussi populaire en France que durant cette triste période !
Si les zazous perdirent leur raison d’être avec la Libération, leur souvenir est resté dans l'Histoire et dans les mémoires, et le mot est inscrit à jamais dans le langage populaire. Dieu merci, à notre époque, on rencontre encore des zazous !

LES ZAZOUS 1939/1945
http://www.bdmusic-egalerie.com/fr/content/166-les-zazous-biographie-illustree-avec-2-cd

Prologue

1934

Avril : le chanteur et chef d’orchestre américain Cab Calloway se produit à Paris au Moulin Rouge ; il avait enregistré Zah Zuh Zaz, chanson dans laquelle on entend pour la première fois les fameuses onomatopées, en novembre 1933.

1938

En mai, Johnny Hess crée Je suis Swing au cabaret parisien Le Bagdad, rue du faubourg Saint-Honoré. Il reprend les onomatopées qui, en français, deviennent za zou zé.  Il enregistre une première fois le 24 mai puis une seconde le 16 novembre. C’est ce disque qui sortira dans le commerce en février 1939.

Histoire

1939

1940

1941

1942

1943

1944

1945

On ne peut guère considérer la “jeunesse zazou“ comme un mouvement contestataire ou d’opposition à l’Occupation et au régime de la collaboration. La seule forme d’opposition active durant cette noire période ne vint que des mouvements clandestins de la Résistance. Mais, pour une partie de la jeunesse (plutôt citadine et parisienne et de milieu aisé… voire protégé), il fallait, tout en restant dans la légalité, essayer de marquer sa différence et apporter un peu de vie, de gaieté, d’optimisme et de… désordre au milieu de l’Ordre Nouveau. Ces jeunes adoptèrent le jazz, qu’on appelait swing à l’époque, et tout ce qui venait des Etats-Unis, horizon de la liberté dans une France qui l’avait perdue. Tout cela dans une situation très ambiguë car, mal vu de l’occupant et des autorités, le swing (jazz) était toléré mais la danse demeurait énergiquement pourchassée. Dans un univers quelque peu confiné — comment imaginez-vous week-ends et vacances sans liberté de déplacement ? —, tout lieu de spectacle remportait un grand succès et, d’une certaine façon, seul le prix du ticket déterminait la densité des uniformes. Musiciens et artistes pouvaient-ils se charger de faire le tri ? Ou choisir le STO de préférence aux scènes parisiennes ? Anecdote : je témoigne de la présence de quelques “militaires“ dans la salle du Moulin Rouge “à ciel ouvert“ pour cause de risques (avérés !) de coupure de courant, début août 1944 au récital Piaf-Montand (MMo). Conséquence pas du tout insolite : le jazz “à la française“ (et les airs apparentés) a connu une vogue populaire sans précédent que seul Sidney Bechet retrouvera après la Libération.

Point de revendication dans ces chansons-swing, bien évidemment, mais des paroles d’évasion — le temps d’une chanson —, parfois narquoises et railleuses (Georgius, Andrex, ou Johnny Hess lui-même qui a pourtant lancé le genre) ou tout simplement anodines ou fantaisistes sans vulgarité (on est très loin du caf’ conc’ de papa). Et puis la censure veillait… Mais les zazous réclamaient-ils autre chose ? Le jazz/swing représentait un moyen pour se singulariser, pour marquer sa différence avec le vert-de-gris ambiant, l’accoutrement un autre, avec des tenues excentriques et provocantes. On a connu ça depuis avec les blousons noirs, les beatniks, les hippies, les punks, les rappeurs, les “grunge“, etc. Mais, durant cette époque de délation, les swings et les zazous risquaient plus gros et subissaient moqueries, vexations (comme les coups de tondeuses dans la chevelure), répressions, ainsi que les charges des journalistes et des dessinateurs de la presse collaborationniste.

Un mot sur le vêtement. La gente masculine s’affublait d’un veston trop long aux épaules tombantes, d’un pantalon étroit et trop court tenu par des bretelles, de souliers de daim (quand on avait les moyens) et d’un chapeau posé sur l’arrière du crâne laissant s’échapper sur le front un toupet ondulé et de longs cheveux dans le cou. La gent féminine s’affichait en chandail à col roulé tombant sur une courte jupe plissée découvrant les jambes jusqu’aux socquettes roulées sur de grosses tatanes à semelles compensées, et, sur une veste aux épaules carrées, quelque fourrure de bazar ou un chapeau qui ne risquait pas de passer inaperçu. Le parapluie et les lunettes noires constituaient des accessoires communs aux deux sexes.

Apparue au début de l’Occupation, la mode zazou ne survit guère à la Libération. Les vedettes (Johnny Hess, Jacques Pills, Raymond Legrand) subissent le contrecoup et, le grand Charles (Trenet) excepté, laissent bientôt la place aux Montand, Aznavour, Bécaud, vrais rejetons de cette époque et d’un swing qu’ils inscriront dans le mouvement d’espoir suscité par la “reconstruction“. Quant à la jeunesse “dans le vent“, elle retrouve sa liberté dans les caves germanopratines, dans les surprises-parties et dans les cabarets ; les amoureux de la chanson se retrouvant dans ces cabarets où le parolier devenait poète.

 Les zazous ? Un feu de paille qui s’est propagé.